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Article par Richard Guay, Église Unie Saint Pierre (Québec), délégué du Conseil régional Nakonha:ka de l’Église Unie auprès du ROJEP 

visage d'une fille avec un arrière-plan de code informatiquePour l’amour de la création et pour rendre gloire au Créateur d’une façon que les générations de chrétiens du passé ne pouvaient pas soupçonner, nous avons pris l’habitude de nous soucier de notre empreinte écologique dans bien des aspects de notre vie.  Nous isolons mieux nos maisons pour éviter les pertes de chaleur.  Nous nous préoccupons de réduire nos déplacements, d’utiliser le transport en commun ou d’acheter des véhicules électriques. Bien sûr, nous tâchons de recycler et de composter tout ce qui peut l’être, d’acheter local et de voir à ce que nos placements soient placés dans des fonds verts. Nous participons peut-être aussi à des marches pour le climat et signons des pétitions ou des lettres d’opinion.  Toutefois, notre utilisation d’internet reste souvent dans l’angle mort de nos possibilités d’agir. Cet article se veut un acte de sensibilisation à cet égard. Nous nous attarderons d’abord à nos comportements individuels, pour ensuite jeter un coup d’œil sur des phénomènes sociaux liés à notre sujet.

Comportements individuels

Nous aurions tort de gronder un jeune enfant qui jetterait une bouteille de plastique à la mer. Vaudrait mieux l’éduquer.  C’est aussi ce qu’il y a à faire face à notre utilisation d’internet.

Lorsque nous naviguons sur la toile, nous ne sommes pas, malgré les apparences, seuls devant notre ordinateur, notre téléphone intelligent ou notre tablette.  L’internet est un réseau où plusieurs ordinateurs, appelés serveurs, interagissent ensemble lorsque nous l’utilisons. Ces grappes d’appareils sont déployées un peu partout sur la planète. Or, il se trouve qu’en raison du faible coût de l’électricité au Québec, plusieurs compagnies s’installent chez nous. À titre d’exemple, le journal Le Soleil nous apprenait le 8 mai dernier qu’on projette de construire un centre de stockage de données numériques de cinq étages sur un terrain appartenant à Hydro-Québec, tout près du Centre Vidéotron[i]. Deux jours plus tard, c’était au tour de Radio-Canada  de nous faire part d’un projet semblable de Google sur des terres agricoles de Beauharnois[ii].

Cela n’est pas sans conséquences sur les émissions de gaz à effet de serre. En raison de l’énergie que ces machines requièrent, toute utilisation du réseau génère des émissions carbone. Ainsi, un courriel standard génère l’émission de 4 gr de CO2. En  lui attachant une pièce jointe, cela peut aller jusqu’à  50g de CO2. Envoyer une photo à un ami équivaut à parcourir 50 mètres en voiture… même si cet ami est à l’étage d’en-dessous. Une étude réalisée en France avant la pandémie comparait l’empreinte carbone du web à celle du transport aérien.  Sans doute que les données seraient différentes aujourd’hui, mais les chiffres parlent.  «Au total, 281 milliards d’emails ont été envoyés dans le monde, chaque jour, en 2018, d’après le cabinet d’études Radicati Group. En prenant cette moyenne de 4 g de CO2 par e-mail, c’est donc 410 millions de tonnes de CO2 par an qui sont générés. Par comparaison, le transport aérien mondial a, quant à lui, produit 859 millions de tonnes de CO2 en 2017, d’après l’IATA. Néanmoins, ce chiffre est largement sous-estimé car il ne prend pas en compte les spams, qui représentent la moitié des messages reçus. Or, même non ouverts, ces messages indésirables produisent 0,3 g de CO2 ! Au total, 80 % des e-mails ne sont jamais ouverts »[iii].

Constatant cela, nous pouvons agir. Ainsi, lorsque possible, le bon vieux téléphone est préférable au courriel ou à Messenger. On peut y penser à deux fois avant d’envoyer un courriel, de partager une photo ou une vidéo sur Facebook, de regarder une vidéo sur YouTube ou ailleurs. Vaut mieux utiliser Netflix en basse résolution. Mais surtout, jetons à la corbeille nos vieux courriels. Désabonnons-nous des infolettres que nous ne lisons jamais. Détruisons les documents et photos que nous laissons inutilement dans le « nuage ». Prendre ces habitudes a tellement d’importance que l’ONU a fait du 20 mars la Journée mondiale du Cyber Word Clean up Day[iv]. Par expérience, vaudrait mieux faire son ménage le 20 de chaque mois tant les choses s’accumulent rapidement.

D’autre part, il faut savoir que lors de sessions Zoom (ou autres visioconférences) « chaque participant qui utilise sa webcaméra et qui diffuse en haute définition génère des émissions pouvant atteindre 1 kilogramme de CO2 par heure de conférence… À titre comparatif, une voiture émet généralement entre 150 et 250 grammes de CO2 par kilomètre parcouru. Les serveurs doivent être refroidis et les grappes de serveurs recourent à un système de refroidissement qui utilise du liquide — de l’eau. Pour chaque nouveau participant à une conférence vidéo, ces serveurs consomment un volume d’eau variant entre 2 et 12 litres par heure.  C’est comme prendre une douche chaque fois qu’on assiste à une réunion sur Zoom »[v]. Heureusement, des nouvelles technologies permettant l’échange de « poste à poste » (P2P) sans passer par des serveurs commencent à poindre. Deux montréalais adeptes de ce paramétrage viennent de lancer Crewdle pour tenter de déloger Zoom et ses semblables, rien de moi[vi]! Le simple fait d’éteindre sa caméra réduit  l’empreinte carbone de… 97%[vii].

Phénomènes sociaux

Des mineurs de bitcoins et autres cryptomonnaies profitent du faible coût de notre hydroélectricité pour venir installer au Québec de plus en plus d’ordinateurs, les faisant fonctionner 24 heures sur 24. La dépense d’énergie qui en résulte est telle « qu’on estime que la quantité de CO2 produit par le minage de bitcoins commence à rivaliser avec les quantités générées par l’extraction des sables bitumineux en Alberta, source de grandes dénonciations internationales »[viii]. Il va sans dire que la spéculation sur ces monnaies virtuelles est à éviter.

Pour la même raison d’économie, apprend-on dans La Presse du 13 avril, deux compagnies étrangères, l’une tchèque et l’autre texane, profitent de «serveurs informatiques de grandes entreprises installées à Montréal »[ix] pour héberger des images de pédopornographie.  Selon les experts cités dans l’article, ces firmes montréalaises, quoiqu’elles soutiennent, ont une responsabilité morale face au contenu de leurs serveurs informatiques. Mais elles ferment les yeux… Cette situation doit être dénoncée tant par son contenu que son contenant.

Les émissions de CO2 générées par le web ne sont pas aussi détectables que celles qui émanent des raffineries de pétrole ou autres industries lourdes. C’est donc sans surprise que la plupart des gens en ignore jusqu’à l’existence. Cependant, de plus en plus de gens commencent à exercer une certaine vigilance face à leurs propres comportements et celui des autres. En espérant qu’ayant lu cet article, vous serez du nombre.

Références

[i] https://www.lesoleil.com/actualite/la-capitale/quel-est-ce-gros-projet-prive-promu-par-la-ville-sur-les-terres-dhydro-quebec-f98c8a967d4d2fb8bfb4187ace6317ec

[ii] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1792024/google-centre-donnees-informatiques-beauharnois-terres-agricoles-quebec

[iii] https://www.futura-sciences.com/planete/questions-reponses/eco-consommation-empreinte-carbone-e-mail-10840/

[iv] https://www.journee-mondiale.com/636/cyber-world-clean-up-day.htm

[v] https://www.ledevoir.com/economie/600184/environnement-le-teletravail-pas-aussi-vert-qu-on-pourrait-le-croire

[vi] ibidem

[vii] https://www.rtbf.be/tendance/green/detail_voici-pourquoi-il-est-preferable-d-eteindre-sa-camera-allumee-pendant-une-visioconference?id=10674744

[viii] Stéphane Parent, La remontée du bitcoin fait bondir la demande d’électricité au Québec. Radio-Canada International, 15 janvier 2021. https://www.rcinet.ca/fr/2021/01/15/la-remontee-du-bitcoin-fait-bondir-la-demande-delectricite-au-quebec/

[ix] https://www.lapresse.ca/actualites/enquetes/2021-04-13/l-autre-epidemie/pornographie-juvenile-ca-se-passe-chez-toi-tu-es-responsable.php

 

[Image libre de droits de Gerd Altmann à Pixabay]