Dans la constitution d’un état démocratique, pour nous, le principe fondamental est la garantie de la liberté de conscience et la liberté d’expression de tous les citoyens et citoyennes. Le concept de la laïcité de l’état est un moyen pour assurer ces libertés.
Il ne devrait pas les limiter plus que nécessaire.
Comme Église, nous comprenons et appuyons entièrement le concept de la laïcité.
Il s’agit d’un garant de respect envers tout le monde, peu importe leurs convictions, leurs contextes culturels ou leurs identités. En fait, comme Église nous mettons tout en place pour vivre les mêmes principes de respect et de liberté à l’intérieur même de nos communautés de foi, l’inclusion étant une valeur essentielle pour l’Église Unie du Canada (égalité homme-femme, pleine acceptation des personnes LGBTQ+, politique d’antiracisme, etc.).
Dans la société québécoise, on débat actuellement le comment vivre la laïcité. Si nous admettons que notre société aujourd’hui est pluraliste avec la présence de groupes divers, nous voulons une laïcité « ouverte » qui ne cache pas les différences, mais qui fait place aux différentes voix pour permettre un dialogue ouvert. Cela nous semble le seul modèle viable pour bâtir ensemble une société forte où tout le monde se sent accepté et peut donner son meilleur. Un débat sur les valeurs et le bien commun est nécessaire. Une connaissance approfondie des différentes visions du monde, incluant des perspectives religieuses, enrichit le discernement et les choix des citoyens et citoyennes.
Nous sommes préoccupés par les discours et l’approche des responsables politiques voulant bannir toute expression religieuse de l’espace public. Il faut distinguer entre les services et les représentations d’État et des espaces publics qui doivent être partagés par les groupes divers de la société.
Il faut aussi distinguer entre différents courants religieux. Par-là, nous ne voulons pas dire qu’on peut accorder une valeur différente aux grandes religions, comme à la religion chrétienne, juive, musulmane ou bouddhiste par exemple. Toutes les grandes religions dans leur version authentique sont porteuses de grandes sagesses et promeuvent un vivre ensemble paisible. Elles l’expriment à travers des prismes différents selon leur histoire et leur culture spécifique. Depuis toujours, il y a eu un débat sur la relation entre l’organisation politique et le message religieux. Il est important alors de distinguer entre des courants minoritaires radicalisés et opposés à une société libre et pluraliste et la majorité des croyants et croyantes des religions qui soutiennent par leurs valeurs et leurs contributions la société de façon positive. Les voix et les actions de groupes religieux fondamentalistes ou radicaux sont souvent projetées comme exemple du phénomène religieux en soi. C’est une caricature grossière. Ainsi, toute expression religieuse se fait discréditer et on entend des propositions voulant éliminer toute manifestation du religieux de la place publique. C’est une approche erronée selon nous. Reléguer la vie religieuse uniquement dans la sphère privée avec le moins de visibilité possible, prive toute la société d’une grande contribution de personnes de bonne volonté qui proposent et partagent les valeurs de respect, de civilité, de solidarité et d’entraide.
Nous sommes convaincus que le pluralisme dans notre société invite non seulement à un bon voisinage mais aussi à l’apprentissage des uns des autres. Si nous pouvons le vivre de façon transparente, nous éviterons l’aliénation des groupes repoussés à l’écart. Le danger de « supprimer » le plus possible les expressions religieuses est de créer un terreau fertile pour des regroupements clandestins et extrémistes. Les recherches sociologiques démontrent qu’une grande partie de Québécois et Québécoises sont toujours à la recherche de sens et de spiritualité. Le dialogue ouvert et transparent s’impose alors dans une démocratie. L’ouverture envers une pluralité de rites et de convictions spirituelles permet de s’entendre sur les meilleures valeurs et l’éthique du bien commun.[1]
Nous invitons le gouvernement du Québec à renforcer le sentiment d’appartenance des groupes religieux à la société québécoise et d’encourager davantage leur soutien positif à la société. Cela permettra aux générations futures de connaître les façons saines de vivre la spiritualité et d’apprendre le sens de communauté où tous et toutes sont interreliés.
Pour une société ouverte au monde, il faut créer des moments de dialogue et des ponts entre divers groupes qui pourront alors collaborer. Une acceptation et intégration des voix religieuses dans le débat public est responsable et incontournable de nos jours. Il faut être proactif pour contrer la polarisation et la radicalisation.
[1] Un exemple de l’intégration positive de la voix chrétienne dans la construction de la société vient de l’Allemagne, où après l’expérience terrible du temps du règne des nazis, les chrétiennes et chrétiens ont créé un mouvement, le « Kirchentag » pour engager un débat public avec les décideurs politiques et économiques une fois par année sur les enjeux sociétaux. L’Église protestante et l’Église catholique alternent planifiant un rassemblement majeur de plusieurs jours (100.000 participants à Hanovre en mai 2025) pour permettre le dialogue dans l’espace publique autour des questions de justice, de paix, d’écologie, du vivre ensemble.
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